Lors du congrès de l’AMUB, qui s’est déroulé du 5 au 8 septembre, le Dr Kacenelenbogen, membre du département de médecine générale de l’ULB, a discuté de l’incapacité de travail prolongée causée par des troubles de santé mentale, lors d’une conférence sur ce sujet. En plus des aspects cliniques, elle a souligné l'importance du rôle du médecin dans les démarches administratives, ainsi que les limites du programme de réinsertion au travail, TRI2.0, proposé par le SPF Emploi et Travail.
Entre 2016 et 2021, les arrêts de travail de longue durée ont augmenté de 46 %, selon l'INAMI, avec deux tiers des cas liés à des dépressions et des burnouts. Ces arrêts représentent un coût de 1,7 milliard d'euros pour la sécurité sociale. Le burnout et la dépression sont devenus un problème majeur, et même des personnes sans antécédents psychiatriques se retrouvent en arrêt de travail en raison de conditions de travail difficiles. Les prescripteurs de ces arrêts sont parfois critiqués pour la durée des interruptions, car plus l'arrêt est long, plus le retour au travail devient difficile. Le Dr Kacenelenbogen reconnaît ces arguments, mais elle déplore la stigmatisation des troubles psychologiques dans le milieu professionnel. Elle soulève la question de savoir si, dans des cas graves, un employé en burnout n’est pas potentiellement un danger pour son environnement professionnel. De plus, certaines situations nécessitent des arrêts de travail plus longs.
Elle souligne également la difficulté de différencier un burnout d'une dépression. Pour le SPF Emploi, la dépression est marquée par une perte totale d'intérêt pour la vie, tandis que le burnout affecte uniquement le travail. Cependant, cette distinction n’est pas toujours aussi claire selon le Dr Kacenelenbogen. Elle insiste aussi sur le fait que de mauvaises pratiques managériales conduisent souvent à une augmentation des burnouts, créant ainsi une épidémie de certificats médicaux d'arrêt de travail. Les médecins se retrouvent dans des dilemmes, hésitant entre prolonger l'arrêt pour protéger le patient ou favoriser un retour au travail risqué.
Le Dr Kacenelenbogen rappelle l'importance d'une prise en charge pluridisciplinaire et souligne le rôle des médecins dans la détection précoce des signes de burnout. Les médecins disposent d'outils tels que les échelles d'évaluation (Bat-23, MBI, CBI) pour évaluer les symptômes du patient. Dans les cas de fatigue intense, un arrêt de travail de quelques semaines peut suffire, mais dans des cas plus légers, une adaptation de la charge de travail peut être une solution. Cependant, elle dénonce le fait que la légitimité des arrêts de travail est souvent jugée par les employeurs, et que le système TRI2.0 n’est pas bien adapté aux patients atteints de troubles mentaux, en particulier ceux qui changent d'employeur après un arrêt.
Enfin, le Dr Kacenelenbogen insiste sur l'importance des rapports médicaux détaillés, notamment pour permettre aux patients de bénéficier du chômage sans être sanctionnés par l'ONEM. Ces rapports doivent expliquer clairement la relation entre le travail et les troubles du patient. Bien que les démarches administratives puissent être lourdes, elles sont cruciales pour la prise en charge des patients et la protection de leurs droits.