Pr Dominique Baudon | 15 Janvier 2025
La prise en charge du surpoids et de l’obésité comprend l’activité physique. Une méta-analyse montre que chaque tranche de 30 min d’exercice aérobique hebdomadaire réduit modestement le poids, le tour de taille et la masse grasse. Au moins 150 min seraient nécessaires pour des effets cliniquement significatifs.
Le surpoids et l'obésité sont parmi les problèmes de santé les plus importants dans le monde. Au cours des 45 dernières années, la prévalence du surpoids et de l'obésité a triplé à l'échelle mondiale (1). L'obésité est un problème majeur de santé publique aux États-Unis particulièrement chez les jeunes, dont la prévalence a doublé chez les adultes âgés de 25 ans et plus et les adolescents de 15 à 24 ans depuis 1990.
Si ces tendances persistent, 48 millions de personnes supplémentaires seront en surpoids ou obèses d'ici 2050, ce qui porterait le nombre à environ 256 millions d’individus (2).
Les recommandations actuelles indiquent que l’activité physique, principalement sous forme d'exercices aérobiques, devrait être l'un des éléments clés des programmes de modification du mode de vie conçus pour gérer l’obésité. Au moins 150 minutes par semaine d'exercices aérobiques* d'intensité modérée sont généralement recommandées pour obtenir une perte de poids cliniquement significative (3).
Bien que les méta-analyses précédentes d'essais cliniques randomisés aient fourni des preuves que l'exercice aérobique est une intervention efficace pour la perte de poids chez l’adulte en surpoids ou obèse, leurs résultats sont principalement basés sur des comparaisons par paires entre les groupes d'intervention et les groupes témoins (3).
En fait, les revues systématiques et les méta-analyses précédentes n’ont pas évalué l'association dose-réponse entre l'exercice aérobique et le poids corporel, la taille et la graisse.
Clarifier la relation dose-réponse de l’exercice aérobique à l’aide d’une méta-analyse
Une équipe internationale a étudié cette possible association dose-réponse entre l'exercice aérobique, d'intensité variable, et des mesures du poids corporel, du tour de taille et de la graisse chez les adultes en surpoids ou obèses. Leurs résultats ont été publiés dans le Jama Network Open fin décembre 2024 (4).
Il s’est agi d’une méta-analyse d'essais cliniques randomisés impliquant des adultes en surpoids ou obèses. L’objectif principal était de clarifier l'association dose-réponse de l'exercice aérobique (exercices hebdomadaires : 30 minutes, ou 150 minutes, ou 300 minutes) avec les mesures d’adiposité.
Les sources de données ont été PubMed, Scopus, le registre central Cochrane des essais contrôlés et la littérature grise (ProQuest et ClinicalTrials.gov) depuis sa création jusqu'au 30 avril 2024. Les essais cliniques randomisés devaient avoir évalué les effets de l'entraînement aérobique supervisé sur les adultes en surpoids ou obèses, avec des durées d’intervention d’au moins 8 semaines, en comparaison avec l’absence d’intervention.
L'extraction des données, selon les directives PRISMA, a été effectuée par 2 équipes de 2 réviseurs chacune, travaillant de manière indépendante. Des méta-analyses d'effets aléatoires ont été effectuées pour estimer les différences moyennes et les IC à 95 % pour chaque exercice aérobique.
Les principaux résultats évalués étaient les mesures du poids corporel, du tour de taille, de la graisse corporelle, les événements indésirables, la réduction de l'utilisation de médicaments et le score de qualité de vie lié à la santé. La certitude des preuves a été évaluée à l'aide de l'outil GRADE, avec une fourchette variant de très faible à haute certitude.
Une amélioration linéaire des paramètres d’adiposité
Au total, 116 essais cliniques randomisés impliquant 6880 participants en surpoids ou obèse (femmes 61 %, âge moyen 46 ans) ont été inclus. L’IMC moyen variait de 25 à 44 kg /m2(moyenne [ET], 31 [3]). La durée d’intervention variait de 55 à 300 minutes /semaine (moyenne [ET], 167 [54] minutes /semaine).
Chaque créneau hebdomadaire de 30 minutes d'exercices aérobiques a été associé à :
- (a) une réduction du poids corporel de 0,52 kg [IC à 95 % -0,61 à -0,44 kg] ; n = 109 essais, GRADE modéré ;
- (b) une diminution du tour de taille de 0,56 cm [-0,67 à -0,45 cm] ; n = 62 essais, GRADE élevé ;
- (c) un pourcentage de graisse corporelle abaissé de 0,37 % [-0,43 % à -0,3 %] ; n = 65 essais, GRADE modéré ;
- (d) une réduction des tissus adipeux (différence moyenne, -1,60 cm2[-2 à -1,07 cm2] ; n = 26 essais, GRADE élevé ; et des tissus sous-cutanés (différence moyenne, -1,37 cm2)
L'exercice aérobique était associé à une augmentation modeste de la qualité de vie, tant sur les aspects physiques (différence moyenne standardisée, 1,69 SD [1,18-2,20]) que mentaux (DMS, 0,74 SD [0,29-1,19]) ; 1 essai avec 80 participants, GRADE faible. Il était associé à une augmentation modeste des événements indésirables légers à modérés, principalement des symptômes musculosquelettiques (différence de risque, 2 événements supplémentaires pour 100 participants [+1 à +2] ; GRADE faible.
Les méta-analyses dose-réponse ont montré que le poids corporel, le tour de taille et les mesures de la graisse corporelle diminuaient de façon linéaire en association avec l'augmentation de la durée de l'exercice aérobique jusqu'à 300 minutes par semaine.
Le degré de perte de poids était de -2,79 kg [IC à 95 %, -3,29 à -2,29 kg] à 150 minutes par semaine et de -4,19 kg [-5,98 à -2,41 kg] à 300 minutes par semaine. L'exercice aérobique d'une durée de 150 minutes par semaine a été associé à des réductions cliniquement importantes du tour de taille et de la graisse corporelle.
Des limites à prendre en compte
Les principales limites sont présentées par les auteurs. Tout d’abord, une grande hétérogénéité dans les données peut limiter la généralisation des résultats. De plus, du fait du faible nombre d'études, il n’a pas été possible d'effectuer de méta-analyses dose-réponse en fonction de l'état de santé des participants (par exemple, chez les patients atteints de diabète de type.
Un faible nombre d'essais étaient disponibles pour certains résultats, tels que la qualité de vie liée à la santé et la réduction de l'utilisation de médicaments, et les essais inclus dans la méta-analyse ont fourni des données insuffisantes concernant les habitudes alimentaires et le statut fumeur des participants. Ainsi, l’éventuelle l'influence de ces importants modificateurs d'effets n’a pu être étudié. Selon les auteurs ces « lacunes » nécessitent une évaluation plus approfondie dans les recherches futures.
Cette méta-analyse de 116 essais randomisés impliquant 6880 adultes en surpoids ou obèses a révélé que les niveaux de poids corporel, de tour de taille et de graisse corporelle diminuaient de manière linéaire avec l'augmentation de la durée de l'exercice aérobique à des intensités modérées à vigoureuses jusque’à 300 minutes par semaine.
La pratique de 30 minutes d'exercice aérobique par semaine était associée à des réductions modestes du poids corporel, du tour de taille et des mesures de graisse corporelle chez les adultes en surpoids ou obèses.
Cependant, un entraînement aérobique hebdomadaire de 150 minutes ou plus, à intensité modérée ou supérieure, a permis d'obtenir des réductions cliniquement importantes du tour de taille et des mesures d’adiposité. Selon les auteurs, leurs résultats suggèrent que cet entraînement au moins 150 minutes par semaine peut être nécessaire pour obtenir des résultats cliniquement significatifs.
* L'exercice aérobique, ou en endurance, implique des mouvements continus qui augmentent le rythme cardiaque et stimulent le système respiratoire. Il comprend des activités d’intensité modérée, basées sur le maintien de l’effort.